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« le: 14 Février 2006 à 13:27:26 » |
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. Un sondage réalisé par une feuille de chou à vocation footballistique auprès des joueurs de la L1 a livré un résultat a priori plutôt étonnant : les deux joueurs les plus détestés de ce championnat seraient Jérôme Rothen et Mario Yepes ! Voyons comment interpréter cela, et ce que l’on peut en déduire...
Une certaine presse footballistique française saura toujours donner son maximum pour raser les pâquerettes, aussi courtes aient-elles été laissées par des prédécesseurs. Créativité, sens aigu de l’émulation interne, quand il n’y a plus de fange à remuer, il se trouve toujours un gratte-papier pour trouver une solution innovante. Là, c’est du côté de chez But! qu’est venue la bonne idée : « et si on apportait la boue nous-même, plutôt que de s’embêter à aller la chercher dans le jardin des autres ? » Ah... La bonne odeur d’égout qui chatouille les narines pourtant averties des connaisseurs de ce bi-hebdomadaire ! Bravo, en voilà un plan sain et agréable. Si on peut se faciliter la tâche tout en élaborant un sujet suffisamment racoleur pour qu’il flatte les bas instincts du populo, que demande le peuple des rédactions du monde du ballon rond ?
Un sondage bien sordide
Voici le concept : Et si on se faisait un petit sondage sur les joueurs les plus détestés de la L1 ? Mais attention, pour que l’affaire soit bien glauque, il faut la pimenter un peu. Il s’agit donc, et c’est une stratégie qui a toujours été choisie par les états totalitaires, d’encourager la délation entre paires. Que les joueurs dénoncent les joueurs. Qu’ils se calomnient entre eux... mais sous couvert d’un relatif anonymat. Le concept n’en sera que plus sordide... voire plus vendeur !
Résultats des courses ? Ce qui devrait arriver au classement de la L1 se produit ici sans que l’on ait à fournir le moindre effort : le Paris SG en présent sur tous les podiums. Et en particulier sur celui des joueurs détestés, puisque Rothen et Yepes trustent avec un brio certain les deux premières places. Seulement une interrogation légitime peut poindre dans l’esprit des lecteurs ayant encore une once de capacités neuronales disponibles. Ces lecteurs qui donc ne font pas partie des habitués de But! sont en droit de se poser la question suivante : Mais pourquoi Rothen et Yepes ont-ils été cités ?
Ni brise-tibias...
On ne déteste pas quelqu’un sans raison. On ne cite pas un autre joueur par hasard... Or tous ceux qui ont répondu au merveilleux questionnaire du papier ayant la passion du foot sont des professionnels. On pourrait donc penser que leur courroux se porterait en priorité vers ceux qui présentent une menace pour eux : les brise-tibias, les faucheurs des pelouses, et tous ces bouchers spécialisés dans l’arrachage ligamentaire. À ce titre il n’est donc pas surprenant de retrouver dans le haut du classement Rool et Jurietti. Voilà des exemples connus et reconnus d’excellents fournisseurs de nouveaux sujets d’études pour les chirurgiens. D’ailleurs, en esthète de la chose, Domenech a reconnu en Jurietti un digne successeur au poste d’écrase-malléole. Pour ceux-là, la haine d’un professionnel est légitime. Évoluer contre de telles brutes c’est prendre le risque de voir sa carrière mise entre parenthèses, et on peut comprendre qu’une perspective de ce genre déplaise à ceux qui ont fait du football leur métier. Mais qui a déjà vu Rothen ou Yepes blesser volontairement un adversaire ?
Si Mario est un adepte des tacles glissés, lui au moins joue systématiquement la balle. Tout le monde ne peut pas en dire autant en L1. Il prend toujours soin d’éviter l’adversaire. Quant à Rothen, songer à le mettre du côté des agresseurs équivaudrait à prouver sa mauvaise foi : Jérôme a fait sienne la case des victimes depuis bien longtemps. Un JéRo en forme ne passe pas un match sans se prendre au minimum un tacle par derrière. Les coups dans les chevilles pris en quatre-vingt-dix minutes, les caresses du bout des crampons et autres tests grandeur nature des protège-tibias, en revanche, il y a bien longtemps que Rothen ne les compte plus. Le dernier match contre Lille n’a pas fait exception à cette règle puisque le sympathique Keïta, ridiculisé une fois de trop par le milieu parisien, a tenu à perpétuer la tradition en forçant l’arbitre à lui coller une bonne petite biscotte pour un tacle spécial haut du mollet sur Rothen. Ce qui lui a d’ailleurs valu d’excellentes notes dans la presse sportive.
...ni provocateurs professsionels
Il faut donc aller chercher ailleurs la raison de cette incompréhensible animosité visant les deux Parisiens. Ils ne sont pas violents... ni agressifs. On en a vu des petits caïds qui tirent les cheveux sur les regroupements. Les héros, troyens à défaut d’être homériques, qui te collent un index dans l’œil sans que personne ne trouve rien à redire dans les commissions d’éthique et autre réunions de grabataires édentés sponsorisées par la LFP, on connaît ça. Mais voilà, pas même une petite affaire d’insulte balancée à mi-voix pour Rothen, aucun crachat sur arbitre Nord-Africain pour Yepes, pas de racisme, ni d’interview règlement de compte à leur coller sur le dos. Diable, c’est ballot cette affaire car il faut chercher les motifs de rancœur autre part...
Reste la paranoïa, et la médiocrité adverse
Que reste-t-il ? Faut-il croire que Rothen est le plus détesté des joueurs de L1 parce qu’il est aussi celui qui assume le plus son amour pour la Capitale ? S’est-il trouvé des joueurs professionnels assez stupides pour retenir ce critère avant d’arrêter leur choix d’anti-parisiens ? On ne peut y croire. Verser dans une paranoïa aiguë serait trop facile. Et pourtant, qu’y a-t-il d’autre pour caractériser ces deux hommes ? Mis à part le talent... Car il faut bien le dire, Yepes et Rothen ont en commun le fait d’être parmi les tous meilleurs à leurs postes respectifs, et de ne rien faire pour s’en cacher.
Oui, un Rothen en forme passera son vis-à-vis dix fois dans un match, et centrera au cordeau autant de fois ensuite... si l’adversaire en question respecte les règles et s’abstient de lui ruiner la cheville après une dernière humiliation. Malheureusement, Rothen n’a pas souvent le loisir de jouer plus de quelques mi-temps avant de tomber face à un nouveau frustré des terrains. Difficile de retrouver son niveau dans ces conditions-là. Et difficile de se faire des amis quand on passe ses matches à ridiculiser du tocard avant de se faire tailler.
Oui, Yepes peut rattraper n’importe quel attaquant de L1 avant de lui lacérer le ballon d’un tacle à la fois surpuissant et sur-précis. Personne ne passe Super Mario. Les inconscients, et autres simples d’esprits ayant tenté le coup ont tous vécu la même pénible expérience : une course, le fol espoir d’un face à face avec le gardien, la brève vision d’une jambe passant à leur côté, happant le ballon, puis le gazon qui se rapproche, se rapproche... Ceux qui essayent de passer dans le dos de Yepes, c’est le cul de ce dernier qui leur répond. Tous ont fini le nez dans le terrain, à brouter, pendant que le défenseur Colombien repartait avec la balle vers le but adverse. La punition made in Colombia.
Quand le talent des uns révèle la nullité des autres
La seule chose que tous les lâches qui ont répondu à cette enquête en citant ces deux Parisiens peuvent avoir à leur reprocher, c’est d’avoir mis en valeur leur propre nullité. Lâches parce qu’il est impossible de qualifier autrement ceux qui crachent leur haine sous couvert d’anonymat. Et nul parce que seule la frustration, la médiocrité et la pleine connaissance de son manque de talent expliquent cette jalousie malsaine. Oui Rothen et Yepes sont bons. Oui Rothen est Parisien et il en est fier. Visiblement cela dérange... Mais après tout, qu’est-ce qu’on s’en fiche ?
Reste à régler le cas du bi-hebdomadaire... Quel plaisir que de vendre du papier en encourageant la haine cachée, les délations anonymes, les petits avilissements moraux ! Quel belle vision du métier de journaliste que de citer finalement les noms des votants, histoire que la suspicion puisse faire son oeuvre dans les semaines qui viennent ! Et surtout, quelle honnêteté intellectuelle que de présenter un vote concernant cinquante personnes comme représentatif des quelques trois cent cinquante joueurs de la L1 !
Rothen, Yepes, les supporters parisiens... Même combat !
Mais alors, pourquoi avoir pris la peine de critiquer cette info si lamentable ? Pourquoi avoir relayé cet étron journalistique puisqu’en parler c’est lui faire de la pub ? Tout simplement parce que cela nous aura permis à tous de faire le lien entre Rothen et Yepes d’une part, et le public parisien d’autre part. Les uns comme les autres sont fiers. Ils sont capables d’être les meilleurs quand ils le veulent, ils sont jalousés, voire détestés pour cela...
Et ils s’en tapent !
Pourquoi devrait-on se cacher ? Pourquoi devrait-on avoir honte d’être les meilleurs ? Pourquoi le fait d’aimer le Paris SG devrait-il nous donner mauvaise conscience ? Pour préserver la susceptibilité d’autochtones venus d’outre-Périphérique ? Pour soigner nos petits sondages de popularité ? La bonne blague ! On n’est pas politiciens, on ne fait que se battre pour le club de la Capitale.
Moralité, on en revient aux fondamentaux : No one likes Rothen and Yepes ? We don’t care !
Arno P-E
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