Il est de vieux conflits dont les origines obscures laissent dubitatifs. Des inimitiés transmises de génération en génération sans que les derniers Montaigu ou Capulet puissent désormais comprendre ce qui les oppose vraiment. Entre le Paris SG et l’OM, de caillassages réciproques en transferts croisés, on commençait à s’y perdre un peu... Heureusement qu’il y a Djibril !
En ce qui concerne les tensions entre le club de la Capitale et celui de la Canebière, il paraîtrait que ce sont les autres qui ont commencé. En tout cas vous pouvez demander à qui vous voulez, la réponse ne variera pas d’un iota :
c’est eux qui nous ont agressé en premier, alors que nous on avait rien fait. Finalement on est donc tous plus au moins d’accord... La seule différence entre la version phocéenne et celle d’Île-de-France, c’est quand il s’agit de dire avec exactitude qui sont "les autres". Parce que là, d’un coup, ça se complique singulièrement : eux disent que les autres c’est nous, alors que pour nous, les autres, et bien ce serait plutôt eux...
Aïe. Mais alors du coup les méchants c’est qui ? Ceux qui ont tiré les premiers, c’est Paris ou Marseille ? Non, mais ça a son importance pour le public du Parc : quitte à se la jouer rivalité ancestrale, lutte éternelle du Bien contre le Mal, etc., bah tant qu’à faire on aimerait autant être du côté des gentils...
Or ces derniers temps entre les jets de fauteuils sur Marseillais, le recyclage de portables usagés en travers de la gueule de Luis Fernandez, ou le lancer de projectiles variés sur bus et autres cibles mouvantes (discipline commune aux deux camps), on serait plutôt proche d’un terrain d’entente... au moins sur la question de la débilité profonde.
Mais heureusement qu’il y a Djibril pour nous mettre tous d’accord.
En ce qui concerne le geste en lui-même, chacun se fera sa propre idée en regardant l’excellent montage vidéo de Ghost75 sur Planete. Comme pour la faute de Frau face à Sedan, de toutes manières il est impossible de tous se mettre d’accord : le joueur était-il en retard ou souhaitait-il secouer son adversaire ? Dans un cas et dans l’autre le pied était trop haut, et la blessure qui s’ensuit trop lourde. Seulement voilà, toute similitude s’arrête là.
Parce qu’après cela, Djibril et Pierre-Alain ont vu leurs chemins prendre des directions totalement opposées. Voici ce que déclarait le Parisien au lendemain du match, le 15 octobre :
En le touchant, j'ai tout de suite vu que je lui avais fait mal. Je suis vraiment navré, je suis allé le voir à la fin du match, j'espère qu'il aura très peu de matches de convalescence. (...) Ça m'embête vraiment. J'ai connu ça une fois à Sochaux où je m'étais fait casser la cheville, ce sont des moments difficiles mais qui peuvent arriver dans une carrière de footballeur. (...) Ce qui m'importe aujourd'hui, c'est que Stéphane Noro, qui ne m'en voulait d'ailleurs pas spécialement après le match, puisse rejouer le plus vite possible.PAF montre ses regrets immédiats. A chaud il va voir Noro, s’excuse, et retourne le voir une nouvelle fois à la fin du match pour prendre de ses nouvelles. De plus, dès la première conférence de presse il exprime ses regrets et souhaite un prompt rétablissement au Sedanais. Dès le départ il aura une ligne de conduite repentante et n’en sortira pas.
Passons au cas Cissé :
Je suis désolé car je ne veux pas le blesser. Il y a le ballon entre nous deux et je mets la semelle. Mais c’est plus sa réaction sur le moment qui me gêne un peu… Je vais m’excuser et lui, il m’envoie presque ch... (...) Je me suis excusé sur le terrain. Il m’a envoyé ch… comme un chien. Demandez à ses coéquipiers, ils étaient là. Le Monsieur pense que je l’ai fait exprès ? Tant pis pour lui. Je ne vais pas me mettre à genoux non plus.Ces citations sont tirées du journal L’Equipe du 06/02. Les phrases citées sont complètes. Chacun peut en vérifier la véracité. Parce qu’à la lecture de ces propos, il a de quoi douter...
Question empathie, on déjà vu mieux que Cissé !
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Mais non, il n’y a pas de trucage, Cissé est bien un monstre d’égoïsme, froid et ne présentant aucune trace de remords. Parce qu’il ne faudrait pas non plus prendre les gens pour des idiots. Quand quelqu’un vous dit qu’il est désolé d’avoir brisé la cheville d’un adversaire, quand il vous explique qu’il s’excuse d’avoir anéanti toute la fin de saison d’un professionnel, mais rajoute dans la même phrase que ce qui le gêne c’est d’avoir été éconduit sur le terrain, vous avouerez que question humanisme et empathie, on a déjà vu mieux !
L’empathie... En voilà un mot qui ne doit pas évoquer grand-chose à l’attaquant marseillais. Cette faculté de se mettre à la place des autres, d’essayer de comprendre ce qu’ils peuvent bien ressentir. Alors Djibril, à ton avis, qu’est-ce qu’il pouvait bien ressentir Yepes quand il a senti sa cheville se briser ? Il a compris qu’il ne rejouerait pas avant cet été ? Et à quoi il pouvait bien penser, assis par terre à se tordre de douleur, après que tu aies essuyé tes jolis crampons orange sur sa malléole ? Tu y as réfléchi combien de temps ? Y as-tu même seulement pensé ?
Non, ce qui gêne Cissé dans cette histoire, sans sourciller, c’est que Yepes ne lui ait pas délivré une accolade franche et virile, bien télégénique, en lui glissant à l’oreille tatouée des mots de réconforts :
Allons, c’est pas grave, ce pied je ne m’en sers pas trop en fait. Et puis après tout, tu n’avais que cinq mètres de retard quand tu t’es mis dans l’idée de m’arriver dessus pied en avant... Mais non, Yepes il a envoyé paître cette chèvre peroxydée, et du coup l’animal est tout vexé. Il boude...
Le gars brise la cheville de Mario et il trouve quand même moyen de dire le lendemain :
Le Monsieur pense que je l’ai fait exprès ? Tant pis pour lui. Je ne vais pas me mettre à genoux non plus. Non mais on croit rêver ! Peut-on faire plus monomaniaque ? Pauvre petit Djib’, c’est que si ça se trouve ça ne va pas être bon pour sa prochaine campagne de pub pour fringues de djeunes cette affaire ! Et puis après tout, il a déjà souffert dans sa chair le Marseillais : voici un autre passage de son interview...
Moi, je n’ai pas reçu de fax ou de coup de téléphone du Chinois et je n’ai pas pleuré. Alors qu’ils arrêtent un peu de me faire ch... Je ne l’appellerai pas. (...) C’est surtout de dire que je ne me suis pas excusé qui me déçoit le plus. C’est très moyen. Franchement, très moyen. Personne n’a rien dit en revanche quand, ensuite, il me met un coup de coude dans le cou. Il le sait et je le sais. Alors qu’ils arrêtent un peu.La vraie victime, c’est Cissé, non ?
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Parce qu’en plus d’être un psychopathe qui trouve plus gênant de se faire éconduire que d’envoyer un type trois mois à l’hôpital, Cissé est très, très con. Il aurait bien aimé recevoir un petit SMS en chinois, ou discuter le bout de gars avec son adversaire asiatique. Sans doute que lorsqu’il s’est fait écrire en mandarin « celui qui porte ce tatouage est une buse » sur la fesse droite notre brave international français en a profité pour apprendre la langue ? Surréaliste de bêtise...
Mais le meilleur, c’est que dans son esprit, la vraie victime c’est lui : Djibril Cissé ! Vous pensez, non seulement Yepes lui parle très méchamment alors qu’il voulait lui présenter des excuses (
désolé, je recommencerai plus... bon, en tous cas pas sur cette cheville-là, maintenant qu’elle est plâtrée ça servirait plus à rien. Bah j’m’excuse de te demander pardon, keskya ?), mais en plus après le Chilien lui a fait drôlement mal en lui donnant un vilain coup de coude.
Oser sortir un truc pareil et croire qu’on va passer pour une victime laisse quand même présager de troubles psychiatriques graves... On notera que vue son interview le pauvre Domenech, qui s’y connaît en tibias brisés, présente les mêmes tares :
Il (Cissé) a ressenti le coup en même temps qu'il l'a donné. La blessure est ancrée en lui, et la provoquer lui-même, cela doit être très dur. Je préfère ce qu'il a fait que ce qu'il a dit. Le pauvre Djibril, il a ressenti le coup en même temps qu’il l’a donné. Terrible... Alors que Mario Yepes lui il a rien dû sentir, c'est sûr... Mario qui déjà ? Ah oui, le gars blessé ! Bon allez, on a dit qu’on s’excusait quoi, c’est bon on est pas des chiens non plus on va pas se mettre à genou. Ou prendre le risque d’avoir l’air sincères... Au fond, comme le dit l'entraîneur de l'équipe de France, on préfère ce qu'il a fait. Quelle phrase hallucinante tout de même !
Le pauvre Cissé, il va falloir le protéger maintenant. Lui expliquer ce qu’il doit dire, et faire, doucement, histoire qu'il ne confonde pas. Dire que c’est la première fois qu’il est violent (enfin si on oublie les coups donnés en match international contre le Portugal, et qui lui ont valu des mois de suspension...). Pour l’intérêt de la Nation, pour l’image du gentil club de Marseille, pour la vente de jean’s et l’ensemble du foot français, dans les jours qui vont venir il va falloir oublier tout ça. Jeter un voile pudique sur cette scène.
Il ne restera que deux certitudes. Celle d’avoir tort, et celle d’avoir raison. Celui qui avait tort c’est Frau, quand il disait un mois après avoir blessé Noro :
Si cela avait été quelqu'un d'autre, aurait-il pris trois ou quatre mois ? On ne le saura jamais. Au contraire... On le saura très bientôt. Et vu la tournure des évènement, ça ne va pas faire rire grand-monde de ce côté ci du Périph'. Quant à la certitude d’avoir raison, c’est la nôtre, celle de tous les supporters du Paris Saint-Germain. Parce que quand on lit les réactions de nos joueurs respectifs au lendemain de ces deux affaires, je vois pas comment je pourrai marcher la tête haute avec un maillot de l’OM sur le dos. Alors que le Rouge et Bleu me semble on ne peut plus honorable.
Avec cette histoire, je me souviens de nouveau bien plus clairement contre quelles valeurs je me bats. Rien que pour ça, heureusement qu’il y a Djibril. Pour le reste, ce triste personnage ne mérite pas que l’on finisse sur lui. Le dernier mot sera donc pour Super Mario. Pour lui dire que le Parc l’attend, le soutient, et pense à lui.
Courage Mario ! Où tu es nous sommes là !