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Auteur Fil de discussion: La part d'ombre  (Lu 2429 fois)
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Arno P-E
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« le: 14 Novembre 2006 à 22:58:30 »

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Depuis quelques journées, parmi les supporters du PSG, tout le monde semble s'accorder sur un point. Pro ou anti-Lacombe, le constat est le même : les Parisiens se créent des occasions, mais au final, le Paris SG ne gagne pas. Reste à trouver la soltion. Et voir si ne nous l'avons pas déjà, en nous.

Paris joue au ballon, créé du jeu et parvient à se montrer dangereux. Mais il ne tue pas ses rencontres. Il ne gagne pas les matches qu'il devrait logiquement remporter. Tout le problème est là. C'est après, quand il s'agit de savoir ce qu'on peut faire pour changer cette situation que les avis divergent. Certains sont pour changer le coach. C'est l'issue qui leur semble la plus sûre, la plus évidente. D'autres, et d'après les sondages ils sont très majoritaires ici, sont pour  maintenir Lacombe en place. Mais alors que faut-il modifier pour que notre club décroche enfin ces victoires qui lui manquent puisqu'on ne veut pas aller chercher un entraîneur à l'extérieur ? Et si on on prenait le contre-pied ? Peut-être faut-il tout au contraire aller chercher à l'intérieur des ressources encore inexploitées... Peut-être que la clef pour le PSG serait que tous, joueurs, supporters, nous parvenions à retrouver au fond de nous le petit plus qui nous manque. Là où nous n'avons plus l'habitude de nous rendre. Là où certains voudraient nous faire croire qu'il ne fait pas bon  traîner. Peut-être qu'il va nous falloir aller puiser dans notre part d'ombre...

Pour illustrer tout cela, laissez-moi vous narrer une petite anecdote. Elle ne concerne pas le monde du ballon rond, mais chacun pourra tout de même s'y retrouver. Il s'agit ici de vous raconter un petit jogging dominical. Vous savez, la sortie que vous faites pour vous dégourdir les jambes et surtout vous aérer l'esprit un lendemain de match nul contre Le Mans. Le bon décrassage décidé sur un coup de tête, et qui vous voit dix minutes plus tard en train de courir dans les bois.

Ahhh... Le bonheur. Un froid sec vous évite de transpirer comme un veau, il n'y a pas trop de monde et vous laissez tourner les jambes. Pendant ce temps au moins vous ne pensez pas à un but qui aurait été marqué par un ancien du PSG, les problèmes de marquage sont loins de votre esprit. Quelques dizaines de mètres devant vous, un joggeur vous sert de lièvre. Enfin vous ne revivez plus en boucle l'arrêt de ce gardien de but qui repousse le tir d'un attaquant ivoirien... Changement de décor, changement d'humeur. Vous avez rattrappé le gars qui vous précédait, sans vous en rendre compte. Regard en coin... Il a un certain âge et semble correspondre au cliché du pré-retraité qui n'a rien d'autre à faire de ses journées que d'aller courir. Sec comme une trique, tee-shirt du semi-marathon de Plougastel, et short échancré... Ridicule short fendu dont tous ces maniaques semblent fans.

Le monde se sépare en deux catégories : les gentils...

Vous arrivez à sa hauteur, vous tournez vers lui parce que vous êtes poli, et lui lancez un agréable bonjour. Le bonjour qui suffirait à restaurer l'image de tous les supporters du PSG de la création tellement il est empreint d'amabilité et de bonne humeur. Violents nous ? Seulement le gars ne vous retourne pas votre salut. Il semble désagréablement surpris et vous toise de haut en bas. Un haussement d'épaules et vous poursuivez votre sortie... Mais c'est bizarre, le gars reste à niveau. Vous l'avez rattrappé, donc vous alliez plus vite que lui, mais là, le vieux reste pile à votre hauteur. Impossible de vous rabattre.

C'est ici que le monde se sépare en deux catégories. Que ferait un Armand, un Kalou ou un Pancrate dans ce cas-là ? Ces gars ont leur qualités et leurs défauts, ils sont plus ou moins doués techniquement, mais ils mouillent le maillot. Ils font ce qu'ils peuvent pour le PSG, non ? Et puis ils sont plutôt sympas en règle générale : pas de déclaration tapageuse, pas de gestes agressifs sur un terrain, pas de coup de gueule. Des mecs réglos quoi. Alors le pépère, bah ils se seraient tournés vers lui, sans doute. Puisque désormais il va à la même allure qu'eux, puisqu'après tout ça n'est qu'un petit footing, pourquoi ne pas courir ensemble et partager ce moment ? Le vieux ne veut pas se faire doubler, alors à quoi bon ? Autant taper la discute...

... et les autres !

C'est sans doute ce que j'aurais fait moi aussi. Si j'avais été dans mon état normal. Sauf que là mon jogging commençait à peine. Il me restait donc des bouffées de rage de la veille. De vieux restes de frustration mancelle que même une nuit de mauvais sommeil et quinze minutes de courses n'avaient pu évacuer. Alors j'ai réagi autrement. Peut-être davantage à la manière d'un Heinze, ou d'un Sorin. J'ai décidé d'éclater le vétéran des 20 km de la galette au beurre. Méchamment. Et avec délectation. Je me suis tourné vers lui alors qu'il s'accrochait et lui ai rendu son regard scrutateur. Pas agréable pour un sous. Fini le bonjour, évaporé le sourire. Tu veux jouer au con ? Je suis resté à sa hauteur, mais en prenant bien garde de ne surtout pas adapter ma vitesse à la sienne. J'ai gardé mon ancien rythme, celui qui m'avait permis de le rejoindre, celui qui était un tout petit peu supérieur au sien. Histoire qu'il n'ait aucun confort, mais pour qu'il puisse tout de même y croire, et se cramponner.

Parce que ce parcours, les habitués du coin le connaissent bien : juste après, dans moins d'une borne, il y a un long faux plat descendant que les coureurs attendent tous. Ah... La bonne portion qui permet de se refaire une cerise. Je ne me suis pas retourné, mais j'entendais la respiration du vieux. Sûr qu'il y pensait à cette légère descente. Sûr qu'il l'attendait. Moi aussi. Parce que quand on le veut, la descente, c'est là que l'on fait la différence. C'est là que l'on fait très mal aux autres. Et quand on a basculé, épaule contre épaule, c'est là que je lui ai mis une mine. Juste quand il pensait enfin se reposer, et pouvoir garder la même allure, mais en profitant de la pente. Juste quand il y croyait, et pile au milieu de la boucle, loin de tout. Je l'ai entendu souffler, souffler, souffler... puis ahaner. J'ai entendu sa foulée qui se modifiait, se raccourcissait. Je l'ai entendu souffrir. Je sentais qu'il avait mal. Mais elle est longue cette descente. Très longue. Surtout quand on va vite. Surtout quand l'autre, devant vous, allonge le pas. Encore. Et ne se retourne pas. Toujours pas. Elle était longue cette descente. Pour nous deux. Très longue. Les jambes se durcissent, puis brûlent... Très, très longue. Trop pour l'autre gars. Parce que de mon côté, quand je suis arrivé en bas, quand enfin je me suis retourné, il y avait beau temps que le marathonien des maisons de retraite avait rangé son short de compétition. En bas, quand j'ai bifurqué à fond de cale pour poursuivre ma course, le pépère n'était plus là. Etouffé en chemin. Arrêté sur le bas côté à cracher ce qui lui restait de poumons, ou à dégueuler son litre de Powerade. J'en sais rien. Et je m'en tape. Tout au long, je ne m'étais pas retourné. Tout au long je me suis délecté de sa souffrance sans même lui donner le réconfort d'un regard. Sans m'intéresser à son pitoyable sort.

Pas de quoi être fier de battre plus faible que soit ?

Alors vous me direz, il n'y a pas de quoi se gargariser. Battre un grabataire à la course de fond, quelle fierté ! Et quel plaisir mesquin que se réjouir de sa douleur. Certes. Il n'empêche qu'il a voulu revenir à ma hauteur et qu'il ne l'a pas fait. Il n'empêche que ce dimanche, là-bas, dans la forêt, il a voulu se tester, il a recherché cette compétition. Alors même si sur le papier il pouvait me sembler inférieur, le résultat c'est qu'il y a eu match, et qu'à la fin il y a eu vainqueur. Et je préfère être du côté des vainqueurs que du côté des perdants, ou de ceux qui font nul au Mans.

Parce que là aussi, notre adversaire pouvait nous sembler inférieur. Regardez les compositions d'équipe ! Regardez les noms, les statuts, les palmarès... Il n'aurait pas dû y avoir photo... Et dans le jeu il n'y a pas eu photo. Seulement au final, ça a fait un partout.

Et c'est sans doute ça qu'il manque à des gars comme Armand, Kalou, Pancrate et compagnie.  Nos joueurs, qu'ils soient titulaires, ou remplaçants, capitaine de route ou jeune espoir, ils ne sont pas assez méchants. Et même en tribune, nous ne sommes pas assez méchants. Attention, je ne dis pas qu'il faut qu'Armand arrache les ligaments à la pelle, ou que nous allions nous battre à coup de hache avec les supporters adverses. Il ne s'agit pas d'être violents... Mais plutôt d'aller chercher cette part d'ombre, enfouie loin en nous.

Chercher la rage

Qu'est-ce qui empêche Kalou d'aller exploser cette balle ? Pas la taper... L'exploser. Avec le ventre autant qu'avec la jambe. Qu'est-ce qui l'empêche de frapper ce ballon encore plus fort ? Pourquoi ne rajoute-t-il pas cette pointe de sauvagerie, ce plus qui vous contracte les muscles du visage... et qui fait que la main du gardien ne tiendra pas ? que de toutes façons, le gardien ne pourra pas l'avoir... Il faut que Kalou aille chercher cet état second qui fait que lorsqu'il se verra en photo le lendemain, il ne se reconnaîtra pas. Cette frappe à la limite, celle qui vous fait mal partout, vous déchire les muscles. Il faut qu'il se transcende. Il faut qu'il ait envie de faire mal. Faire mal à ce gardien. Il faut qu'il ait envie de passer devant lui sans le regarder pour aller chercher le ballon au fond des filets. Il faut vouloir vivre ça ! Le gardien, à terre, qui regarde la balle du mauvais côté de la ligne. Les défenseurs adverses, scotchés, abasourdis. Oui, ils en souffrent. Tous ces entraînements, tous ces efforts, et ce ballon, là, dans les buts... Et Kalou, le souffle rauque, les tempes qui battent, qui marche pour le ramasser. Ce ballon que le gardien a touché. Ce ballon qui a été détourné, oui, mais qui est passé quand même.

Chercher la souffrance

Au milieu il faut que Pancrate ressente le besoin de passer son adverse. Une fois. Dix fois. Encore. Le besoin de lui pourrir son match. Un centre. Un grand-pont. Une course le long de la touche. Un une-deux. Un dribble. Un jeu à une touche de balle. Il faut le passer. Et encore. Et encore. Oui, en face le gars va se faire écharper par la presse demain. Il faut le passer, et centrer. Il se fait huer par les tribunes. Il faut le passer et frapper au but. Il faut lui faire mal. Même quand les cuisses sont à la limite de la crampe. Il faut que Pancrate ait envie de voir son vis-à-vis regagner les vestiaires en ragardant ses pieds. Même si lui termine épuisé, le coeur sur les lèvres. Que son adversaire ait honte de son match. Même si pour cela, Pancrate doit finir au delà de la limite. Il faut que l'on voit ce défenseur, à la peine, cassé, brisé. Il faut aller chercher ça. Ce plaisir de faire mal à un gars que l'on ne connaît pas, à ce joueur que l'on n'a jamais vu... ou même à un ancien équipier. C'est sans doute un type sympa. Un footballeur lambda. Tant pis pour lui. Il faut qu'en face de Pancrate, ou de Rothen, ou de Diané et de Rodriguez, de qui vous voulez, les défenseurs terminent fracassés. Et qu'on s'en délecte. Qu'on ait tout fait pour et que ça nous fasse plaisir.

Chercher à faire mal

Derrière, il faut qu'Armand annihile les attaques adverses. Il faut qu'après un tacle, alors que son adversaire rassemble ses esprits, Sylvain ait déjà relancé. Il faut que les actions se brisent sur lui, quatre-vingt-dix minutes. Il faut que les attaquants soient étouffés. Sur coups de pied arrêtés ? Armand au marquage. Collant. Ballon de la tête ? Choc avec Armand. Dur. Dans le combat ? Contact avec Armand. Rugueux. Il faut que les gars aient mal. Qu'ils soient convaincus que ça ne passera pas. Que ça ne pourra pas passer. Il faut que si par hasard le ballon parvenait jusqu'à eux, ce soit avec Armand collé à lui. A bout de souffle s'il le faut. Qu'ils n'y croient plus. Même si Armand souffre, lui aussi, de ces chocs, tirages de maillots, de ces chutes et de ces coups, vicieux. Que les buteurs frappent le sol de la main, de rage, au pied de notre défenseur, debout après une énième interception... Et que Armand y prenne du plaisir, malgré une béquille et les bleus qu'il aura, demain. Qu'il sente les attaquants adverses, dégoûtés, juste contre lui. Qu'il devine leur impuissance alors qu'il vient se replacer au marquage, après avoir sorti la balle. Sans même les regarder, qu'il puisse goûter leur frustration, là, à quelques centimètres à peine. Et qu'à l'autre bout du terrain, Pancrate torture son vis-à-vis. Et que Kalou crucifie le gardien. Qu'il ne lui laisse même pas espérer avoir une chance d'arrêter un ballon.

Chercher à SE faire mal

Pendant que nous, en tribune, on étouffera les visiteurs. Ces gars sont comme nous, on sait tous ce que c'est que de faire un déplacement. Ca prend du temps, ça coûte cher, on rentre crevé... Ca n'est pas toujours agréable. Alors si en plus notre équipe s'est fait briser... Si le milieu a couru dans le vide, si les attaquants se sont cognés contre un mur et si le gardien s'est fait trouer, alors là... Là c'est affreux. Là en tribune on sait tous que dans le bus, le retour virera au cauchemar. Au long cauchemar éveillé.

C'est ça qu'il faut que l'on recherche. Il faut avoir envie de pourrir la soirée des visiteurs. Qu'ils passent quatre-vingt-dix minutes de merde, noyés sous nos chants. Qu'ils ne puissent même pas s'entendre. Jamais croire qu'ils pourront galvaniser leur équipe. Il faut que, tournés vers nos joueurs, on les devine du coin de l'oeil, muets, le visage bloqué. Il faut que pendant qu'Auteuil et Boulogne se répondent, la tribune F soit figée. Il faut que l'on gueule et que l'on sente leur souffrance, et leur impuissance. Même quand on a la gorge défaite. Même quand les bras tirent d'avoir été tendus trop longtemps. Quand on n'en peut plus que l'on s'assierait bien. Il faut qu'on sente la tristesse, là, à côté de nous et que ça nous donne envie d'en remettre une couche. Sans les insulter, sans nous moquer d'eux. Pire. En les ignorant. Il faut que l'on porte encore plus haut le PSG et qu'on les sente, eux, s'enfoncer sur leurs strapontins.

Il faut, tous, que l'on aille chercher cela en nous. Le plaisir de remporter ces duels que l'on doit remporter. Que l'on tue ces matches où nous sommes supérieurs. Il ne faut pas avoir peur d'être méchants, et de meurtrir l'équipe d'en face. Au contraire. Il faut que l'on s'en délecte. Que nos joueurs aillent hypocritement répondre en interview que notre adversaire n'était pas si mauvais, mais que bon... Que l'on se fasse mal, pour faire mal. Que l'on se force. Il faut que l'on retourne chercher notre part d'ombre.


Arno P-E Gros sourire
Journalisée

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